Étude de cas : pratiques fortes et enjeux de durabilité dans le logement communautaire albertain – Community Housing Transformation Centre – Centre de transformation du logement communautaire
6 Nov, 2024

Étude de cas : pratiques fortes et enjeux de durabilité dans le logement communautaire albertain

Organisational compass
Par Centre

Au printemps 2024, le Centre a proposé aux membres de l’Alberta Seniors & Community Housing Association (ASCHA) de faire un bilan de leurs pratiques et défis à l’aide de la Boussole organisationnelle. Cet exercice n’a pas seulement été utile pour les membres individuels, mais il a également conduit à l’agrégation des données collectées, ce qui a permis d’identifier des tendances au sein du groupe. Les résultats ont été présentés lors de la conférence de l’ASCHA en mars.

L’analyse qui suit reprend ces résultats et s’attache à explorer les forces et faiblesses du groupe d’organisations participantes.

La Boussole organisationnelle : un cadre pour mesurer et améliorer l’impact du logement communautaire

La Boussole organisationnelle est un outil aidant les organisations de logement communautaire à évaluer et renforcer leur impact en analysant les aspects clés de la gouvernance, la gestion financière, la gestion immobilière et l’engagement communautaire. Elle permet d’identifier les forces et les défis, offrant un cadre pour un développement durable adapté aux besoins des communautés.

L’agrégation des données tirées de la Boussole révèle des tendances communes et fournit des informations pour informer les politiques publiques et encourager un développement sectoriel plus stratégique.
Ce rapport est basé sur les données fournies par 15 organisations de logement communautaire de l’Alberta. Ce groupe ne représentant que 19 % des fournisseurs de logement communautaires membres de l’ASCHA, nos données ne sont pas statistiquement représentatives de l’ensemble des membres.

Il n’en demeure que leur analyse devant une centaine de fournisseurs de logement présents lors de l’atelier de mars 2024, a provoqué des conversations animées, le partage d’expériences et de pratiques entre les participant.es. Cela nous mène à croire que cette étude de cas est un outil de réflexion pertinent pour les Albertains, mais aussi pour l’ensemble du pays.

Forces et enjeux des organisations participantes

Les résultats du groupe mettent en évidence des pratiques solides en gouvernance et en gestion immobilière, mais révèlent des défis importants en gestion financière et en relations sociales et communautaires.

Gouvernance : solidité structurelle et enjeux de diversité

La gouvernance ressort comme la catégorie la plus solide parmi les 15 organisations, avec des pratiques structurées et un bon niveau de conformité. Cependant, des aspects tels que l’inclusivité et la diversité nécessitent des améliorations pour renforcer la représentativité et la résilience des organisations.

Points forts

  1. Pratiques de gouvernance bien établies : elles font preuve de rigueur dans leurs pratiques de gouvernance. Environ 91 % des conseils tiennent régulièrement des réunions, examinent les états financiers et respectent les obligations légales, garantissant une transparence et une responsabilité accrues.
  2. Diversité des compétences au sein des conseils : la majorité des conseils incluent des membres ayant une variété de compétences, telles que la gestion, la comptabilité, le droit et le travail social. Cette diversité de compétences permet aux conseils d’aborder les défis complexes de manière informée et holistique.
  3. Conformité et suivi des obligations légales : près de 98 % s’assurent de leur conformité aux réglementations en vigueur, ce qui contribue à une gestion professionnelle et à la réduction des risques juridiques.

Domaines d’amélioration

  1. Manque de diversité et d’inclusion des locataires : la composition des conseils d’administration reste peu diversifiée, tant en termes de représentation des locataires que de diversité culturelle. Seulement 4 % incluent des locataires dans leurs conseils, ce qui limite la voix des résidents dans les processus décisionnels.
  2. Insuffisance des programmes de formation et de planification de la relève : bien que 61 % des conseils disposent de programmes de formation et de planification de la relève, cela reste insuffisant pour assurer la continuité et le développement des compétences au sein des équipes dirigeantes.
  3. Transparence limitée avec les locataires et parties prenantes : la communication entre les conseils d’administration et les locataires reste limitée, ce qui pourrait réduire l’engagement des locataires et limiter leur compréhension des décisions prises par les conseils.

Bilan de la gouvernance

La performance du groupe s’explique en partie par les politiques provinciales de l’Alberta, comme le plan « Stronger Foundations », qui encouragent une gouvernance structurée et une meilleure gestion des organisations. Le soutien de l’ASCHA a également joué un rôle crucial dans ces résultats.

L’analyse de la gouvernance montre toutefois un équilibre entre rigueur et limites structurelles. Bien que les conseils d’administration soient rigoureux et diversifiés en compétences, ils manquent d’inclusivité et de diversité dans la représentation des locataires. De plus, la forte conformité légale ne se traduit pas toujours par une transparence envers les résidents, ce qui pourrait créer des tensions.

Enfin, malgré des compétences variées, l’absence de programmes de formation et de relève limite l’adaptabilité des conseils face aux défis futurs. Pour renforcer leur résilience, une gouvernance plus inclusive et transparente, soutenue par une formation continue, serait bénéfique.

Gestion financière : stabilité relative, dépendances et défis à long terme

La gestion financière constitue un domaine crucial pour la stabilité des organisations. Bien que plusieurs dans le groupe montrent une bonne stabilité financière au présent, des vulnérabilités apparaissent, surtout en ce qui concerne la durabilité à long terme.

Points forts

  1. Faible taux d’arriérés de loyer : environ 84 % signalent un taux d’arriérés de loyer minime, ce qui reflète une bonne gestion des loyers et une capacité à maintenir des revenus réguliers, essentiels pour la stabilité financière.
  2. Stratégies de prévention des expulsions : près de 67 % ont mis en place des politiques de prévention des expulsions, ce qui, non seulement protègent les locataires vulnérables, mais favorise aussi la continuité des revenus pour l’organisation.
  3. Efficacité dans la réduction des coûts d’exploitation : plusieurs ont adopté des pratiques visant à réduire les coûts d’exploitation (par exemple, efficacité énergétique et gestion des ressources). Cette approche proactive aide à préserver les ressources financières tout en assurant un cadre de vie agréable pour les locataires.

Domaines d’amélioration

  1. Dépendance aux subventions : près de 67 % indiquent que leurs loyers actuels sont viables uniquement grâce aux subventions. Cela crée une situation financière précaire, les rendant vulnérables si les subventions venaient à diminuer ou à être supprimées.
  2. Absence de plan de viabilité post-convention : seulement 30 % ont développé un plan de fin de convention. Ce manque de préparation limite leur capacité à anticiper et gérer les risques financiers à long terme.
  3. Réserves de capital insuffisantes : seuls 41 % disposent de réserves suffisantes pour financer les rénovations planifiées. Cela représente un risque, car les besoins non couverts pourraient détériorer les infrastructures, affectant ainsi la qualité de vie des résidents.

Bilan de la gestion financière

L’analyse met en évidence un cercle vicieux : la dépendance aux subventions empêche la constitution de réserves suffisantes, ce qui à son tour rend les organisations encore plus dépendantes de financements externes pour les maintenir opérationnelles.
Bien que les pratiques financières actuelles assurent une stabilité pour les locataires, l’absence de plan de viabilité à long terme et de fonds de réserve pour les rénovations expose le groupe à des risques importants. Une réduction des subventions pourrait forcer ces organisations à limiter leurs services ou à augmenter les loyers, ce qui irait à l’encontre de leur mission sociale.
Par ailleurs, bien que les coûts d’exploitation soient réduits par des mesures d’efficacité, cela ne compense pas le manque de fonds dédiés aux rénovations majeures. Des imprévus pourraient compromettre la qualité et la sécurité des logements.
En somme, il est essentiel de mettre en place des stratégies de viabilité financière pour pérenniser l’impact social de ces organisations et réduire leur dépendance aux subventions.

Gestion immobilière : Réactivité aux besoins immédiats et vulnérabilité à long terme

La gestion des propriétés est un domaine dans lequel ces 15 organisations montrent une performance globalement satisfaisante. Cependant, des lacunes en matière d’évaluations régulières des bâtiments et de fonds de remplacement des immobilisations révèlent des risques pour la durabilité et la qualité des services.

Points forts

  1. Réactivité aux demandes des locataires : près de 93 % se montrent efficaces pour répondre aux demandes des locataires, notamment en matière de réparations et d’entretien. Cette réactivité contribue au bien-être des résidents et renforce la satisfaction des locataires envers leur environnement de vie.
  2. Maintenance préventive proactive : environ 67 % adoptent des stratégies de maintenance préventive, ce qui réduit les coûts de réparations d’urgence et prolonge la durée de vie des bâtiments. Ces pratiques permettent de maintenir les infrastructures en bon état et de prévenir des problèmes structurels majeurs.
  3. Bon état des bâtiments : près de 73 % indiquent que leurs bâtiments sont dans un bon état général, ce qui est un signe de bonne gestion immobilière. Cet aspect reflète un engagement à offrir des logements sécurisés et confortables.

Domaines d’amélioration

  1. Manque d’évaluations régulières des bâtiments : seulement 23 % des propriétés ont récemment fait l’objet d’une évaluation complète de l’état du bâtiment. L’absence de ces évaluations pourrait entraîner une ignorance des besoins critiques de maintenance, posant des risques pour la sécurité et la qualité de vie des résidents.
  2. Contributions irrégulières aux fonds de remplacement des immobilisations : près de 43 % rapportent des contributions irrégulières à leurs fonds de remplacement. Cela les expose à des difficultés financières en cas de travaux d’urgence.
  3. Dépendance aux subventions pour la maintenance : bon nombre dépendent des subventions pour couvrir les coûts de maintenance. Cette dépendance pourrait limiter la capacité à maintenir des niveaux d’entretien adéquats si les subventions sont réduites ou supprimées.

Bilan de la gestion immobilière

La gestion immobilière montre une forte réactivité aux besoins quotidiens des locataires, avec des pratiques de maintenance préventive et des bâtiments globalement bien entretenus.
Cependant, des faiblesses structurelles subsistent : l’absence d’évaluations régulières expose les organisations aux risques de besoins non anticipés en maintenance, tandis que des fonds de remplacement irréguliers et la dépendance aux subventions fragilisent leur capacité à assurer une durabilité à long terme.
Pour consolider leurs atouts, il est recommandé de structurer les contributions aux fonds de remplacement, d’instaurer des évaluations périodiques et de diversifier les sources de financement.

Relations sociales et communautaires : Implication ponctuelle, manque d’intégration durable

Les relations sociales et communautaires se révèlent être le domaine le plus faible des quatre catégories pour le groupe. Bien que des efforts soient déployés pour encourager l’implication communautaire, le faible niveau de participation des locataires dans les processus décisionnels et la diversité insuffisante des activités limitent l’impact de ces initiatives.

Points forts

  1. Participation des locataires aux événements communautaires : environ 66 % rapportent une participation active des locataires aux événements communautaires et à l’utilisation des espaces partagés. Cette interaction favorise les liens et le sentiment de communauté.
  2. Reconnaissance de la diversité économique et raciale : la diversité est reconnue au sein de ce groupe, notamment en termes de diversité économique (37 %) et raciale (40 %). Cette reconnaissance souligne une sensibilité aux réalités des locataires, bien qu’il y ait encore des efforts à faire pour inclure ces groupes dans les décisions.
  3. Utilisation de services et d’espaces communautaires : entre 52 et 79 % des locataires utilisent les services et espaces communautaires, ce qui témoigne d’une intégration des résidents dans la vie collective et contribue à créer un environnement social dynamique.

Domaines d’amélioration

  1. Faible participation des locataires dans la gouvernance : seulement 4 % incluent des locataires dans leurs conseils d’administration et seulement 19 % des locataires participent aux processus décisionnels. Cette absence de représentation limite les opportunités pour les résidents de contribuer activement aux décisions qui impactent leur milieu de vie.
  2. Faible engagement des résidents dans les initiatives à long terme : bien que les locataires participent aux événements communautaires, leur implication dans des projets durables reste limitée. Ce manque d’engagement continu freine le développement de relations sociales solides et restreint les retours constructifs pour améliorer les services communautaires.
  3. Faible priorité accordée aux relations sociales : comparées aux autres catégories, les relations sociales et communautaires sont perçues comme une priorité moindre par certaines organisations, ce qui pourrait expliquer les faibles scores dans cette catégorie. Cette situation pourrait limiter les efforts pour renforcer le sentiment d’appartenance des locataires.

Bilan des relations sociales et communautaires

Le groupe produit des efforts pour l’inclusion sociale des locataires à travers des événements communautaires et l’usage des espaces partagés. Cependant, bien que les locataires soient actifs dans ces activités, leur participation dans la gouvernance reste marginale, avec seulement 4 % impliqués dans les conseils d’administration.
Cela limite leur capacité à influencer les décisions qui affectent directement leur quotidien. La reconnaissance de la diversité économique et culturelle est présente, mais ne se traduit pas encore en initiatives durables favorisant une implication continue.
Pour aller plus loin pour renforcer les liens sociaux et la cohésion au sein des résidents, une priorité accrue aux relations sociales et une intégration des locataires dans la gouvernance seraient bénéfiques.

Vers une résilience accrue : Consolider les forces et relever les défis pour un impact durable

En somme, l’analyse que nous a permis de réaliser la Boussole organisationnelle a mis en évidence des forces solides sur lesquelles ce groupe pourra construire et des défis notables sur lesquels il devra travailler afin d’assurer une pérennité plus sereine à leurs organisations.

Les pratiques de gouvernance et la gestion immobilière se distinguent par leur rigueur et leur efficacité au quotidien, mais révèlent des fragilités structurelles, notamment en matière d’inclusivité, de diversité et de durabilité à long terme.

En gestion financière, la dépendance aux subventions expose les organisations à des risques, soulignant la nécessité de stratégies de viabilité et de diversification des revenus.

Enfin, les relations sociales et communautaires, bien que présentes, restent sous-développées dans leur potentiel d’inclusion et d’engagement durable.

En consolidant ces aspects, les organisations seraient mieux armées pour répondre aux besoins de leurs résidents tout en assurant leur résilience et leur impact à long terme.

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