L’accessibilité universelle dans le domaine du logement est une question qui touche de nombreuses personnes vivant avec des limitations physiques. Les chiffres parlent d’eux-mêmes: selon l’Office des personnes handicapées du Québec, plus de 21% de la population québécoise ayant 15 ans et plus vit avec des limitations fonctionnelles. Ce taux est en progression en raison du vieillissement de la population et des handicaps temporaires.
Pourtant, seulement 1% des logements communautaires au Québec sont réservés aux personnes en situation de handicap, et seuls les gros bâtiments sont tenus de respecter les exigences de construction. L’accessibilité universelle dans le secteur du logement est encore loin d’être la norme.
Mon logement accessible universellement est une campagne qui a été lancée pour changer cela de manière significative. Initiée par Société Logique et soutenue par le Centre, cette campagne a rassemblé des partenaires de quatre régions du Québec dont Ex aequo à Montréal, Ailia en Montérégie, Bail Mauricie en Mauricie/Centre du Québec et Capvish à Québec. Ces organismes, tous très actifs au niveau de la promotion du logement accessible, ont travaillé conjointement. Leur objectif : interpeller les acteurs du secteur du logement, qu’ils opèrent dans le milieu public, communautaire ou à but lucratif, d’inclure les principes de l’accessibilité universelle. Ces principes sont à respecter dans les nouvelles constructions et dans l’élaboration de programmes de financement pour le logement.
L’accessibilité universelle fait référence à la façon dont un logement est conçu, construit ou modifié pour permettre à des personnes ayant un handicap de vivre de façon autonome. Elle passe par la conception, mais aussi par l’ajout de caractéristiques qui rendent une habitation plus accessible.
Les coûts de construction de l’accessibilité universelle: un faux problème
« Il est vrai qu’un tiers de la population déclare avoir des difficultés à accomplir ses activités quotidiennes…. Mais 50 % de la population canadienne déclare avoir des proches vivant avec des limitations fonctionnelles… C’est ce que nous observons sur le terrain, en termes qualitatifs », souligne Pierre-Étienne Gendron-Landry, directeur général de Société Logique. « Il est nécessaire de proposer des solutions de logement adaptées aux besoins des individus vivant avec des limitations ainsi qu’aux besoins de leur ménage. »
Un large éventail de ressources relatives au logement accessible et adaptable, a été développé par des organisations à travers le Canada, depuis les principes de conception jusqu’aux rénovations et aménagements. La Société canadienne d’hypothèques et de logement SCHL décrit les facteurs à considérer pour chacune des pièces et chacun des éléments d’une habitation dans une série de feuillets d’information et invite à les prendre en considération dès la conception. Mon logement accessible universellement avance également qu’il serait plus convenable de répondre à la demande croissante, dès la conception, en construisant plus d’unités de logement universellement accessibles. C’est l’adaptation au cas par cas, selon les besoins du requérant, qui est souvent coûteuse et peu efficace pour les ménages locataires les plus démunis.
Au Québec, bien que les espaces communs des plus gros bâtiments d’habitation sont généralement accessibles, leurs unités de logement le sont rarement. Les plus petits bâtiments, quant à eux, le sont encore moins.
La perception courante veut que le logement accessible soit exclusivement associé au secteur public ou communautaire. Cependant, un nombre significatif de personnes pourrait potentiellement accéder au marché à but lucratif.
Société Logique a travaillé sur un projet concret, démontrant la viabilité de la construction de logements accessibles. Le projet a reconsidéré les plans d’étage standard des unités d’habitation dans les immeubles. Il a démontré que les adaptations nécessaires pour rendre les logements accessibles n’entraînent qu’une augmentation de coûts relativement modeste, allant de quelques centaines à quelques milliers de dollars par unité. Les résultats obtenus aident à démystifier l’idée que rendre les logements accessibles est financièrement prohibitif.
Intégration de la perspective de l’accessibilité universelle au Québec et au Canada
Selon le code de construction du Québec, de nombreux projets sont exemptés des exigences et des normes de conception sans obstacles. Les immeubles de moins de 8 logements et moins de 4 étages qui constituent la majorité des constructions au Québec ne doivent pas répondre à ces exigences. Certaines municipalités comme Laval et Longueuil sont pourtant allées au-delà du code de construction, adoptant des réglementations plus strictes. Il s’agit de pousser la réglementation pour avoir plus d’immeubles de plain-pied, et plus de logements qui sont accessibles au rez-de-chaussée des plus grands immeubles.
Certaines municipalités dans d’autres provinces au Canada ont modifié leurs règlements d’urbanisme pour imposer des critères d’accessibilité stricts à chaque nouvelle construction. Vancouver, par exemple, a introduit une modification qui exige que toutes les nouvelles constructions intègrent un nombre accru d’unités accessibles ou sans obstacle.
Le travail accompli dans les différentes étapes de la campagne Mon logement accessible universellement, a intégré l’analyse des initiatives similaires dans diverses régions. Pour les acteurs de cette mobilisation, créer des solutions concrètes pour une accessibilité universelle est une perspective qui peut être intégrée de manière réaliste dans nos pratiques quotidiennes, et dans tous les milieux du secteur du logement.
Au milieu des préoccupations liées à la crise du logement, des doutes peuvent surgir quant à l’opportunité d’aborder la question de l’accessibilité universelle. En réponse à ces doutes, M. Gendron-Landry souligne que, justement en raison de cette crise, l’intégration de la perspective de l’accessibilité universelle revêt une importance cruciale. « Il est primordial de prendre en compte la diversité des capacités lors de l’élaboration de solutions, que ce soit au niveau des politiques publiques ou au sein des organisations communautaires. » Dit-il.
Le secteur du logement communautaire a longtemps été un fer de lance de l’inclusion sociale, pionnier dans l’intégration des normes d’accessibilité universelle. Toutefois, avec la demande croissante et les défis persistants, il est devenu évident qu’il ne peut à lui seul répondre à tous les besoins, d’autant plus que son parc de logements a rétréci au fil des ans. Pourtant, notre secteur continue d’étendre les normes d’accessibilité au-delà de nos propres bâtiments, sachant que des collaborations à grande échelle sont nécessaires pour créer des environnements inclusifs et accessibles pour tous.