Partout au Canada, depuis plusieurs années, la crise du logement s’envenime sans cesse. Si cette crise affecte l’ensemble des Canadiens et Canadiennes, force est de constater que les personnes racisées en subissent plus sévèrement les conséquences.
La journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale est l’occasion, pour le Centre de transformation du logement communautaire, de mettre en lumière le lien inextricable entre l’enjeu du logement et celui des inégalités sociales. Notre mission vise à renforcer l’inclusion sociale et à déconstruire les pratiques d’exclusion malheureusement vécues par des personnes racisées.
L’ampleur du problème du logement pour les personnes racisées
Un article de Statistique Canada basé sur des données des recensements de 2016 et 2021 révèle qu’en 2021, 11,3% des Canadiennes et Canadiens racisés vivaient dans un logement avec des besoins impérieux. Le fait que ces personnes vivent dans des logements de piètre qualité, trop petits, parfois insalubres auxquels elles consacrent plus de 30% de leurs revenus avant impôt exacerbe leur vulnérabilité. Cette réalité entraîne des répercussions directes sur leur santé, leur état financier et compromet leur accès à leur droit à l’égalité.
Les Asiatiques occidentaux, les Coréens et les Arabes sont surreprésentés parmi les populations ayant des besoins impérieux en logement. Pourtant, la proportion générale est en baisse.
Défis pour les personnes racisées en quête de logement
Les organismes qui travaillent dans le secteur du logement communautaire reçoivent de nombreux témoignages de personnes racisées qui éprouvent des difficultés à trouver un logement adéquat. Il est rare d’entendre les voix de ces personnes, car elles craignent les représailles de la part de leur propriétaire. La situation apparaît encore plus complexe, lorsque ces personnes cherchent un logement alors qu’elles immigrent.
Leurs demandes sont souvent ignorées, ou bien les propriétaires prétendent que les logements sont déjà loués. Ne pas avoir un historique de crédit suffisant agit souvent comme prétexte pour les propriétaires qui imposent alors des critères additionnels. Beaucoup se font demander de payer six mois de loyer en avance ce qui constitue une violation des droits des locataires. Cela crée beaucoup d’inquiétudes et de frustrations.
Logements et discrimination
Le rapport d’une recherche récente menée par le Canadian Centre for Housing Rights (CCHR) dans la région de Toronto démontre en effet que même lorsque des logements sont disponibles, les obstacles à leur accès sont accrus par le traitement discriminatoire des nouveaux arrivants racisés. La discrimination basée sur l’origine ethnique se conjugue aux autres facteurs discriminants comme le genre et le statut familial.
Plus du quart (26%) des parents noirs monoparentaux de Toronto ont éprouvé de la discrimination en essayant de se loger selon le rapport de 2009 du CCHR sur la discrimination sur le marché locatif à Toronto, un rapport qui reste l’une des ressources les plus citées sur le sujet. Les nouvelles données avancent que la discrimination est 267% plus importante quand les personnes appelant pour demander du logement ont un accent racisé, et 563% plus marquée chez les femmes immigrantes racisées qui déclarent avoir des enfants comparativement à celles qui ne donnent pas d’information sur leur statut parental (Sorry it’s rented: Measuring discrimination against newcomers in Toronto’s rental housing market, 2022). Il est donc essentiel de réitérer que les facteurs de discriminations s’additionnent et complexifient la quête de logement pour les personnes racisées.
Espoir et solution : l’inclusion sociale est dans l’ADN du logement communautaire
La bonne nouvelle, c’est que le pourcentage de personnes racisées vivant avec des besoins impérieux en matière de logement a diminué de 6.5 points comparativement au recensement de 2016 (rapport Statistique Canada). Les programmes d’aide pour personnes à faibles revenus durant la pandémie ont certainement contribué à faire une différence et la Stratégie nationale pour le logement adoptée en 2017 promet de l’accélérer grâce à des investissements dans le logement communautaire.
Nous partons toutefois de loin et il reste énormément d’efforts à déployer pour assurer une équité entre personnes racisées et caucasiennes en matière de logement au pays.
Nous sommes convaincus que le logement communautaire constitue un excellent moyen de briser ces mécanismes insidieux de la discrimination. L’inclusion sociale est dans l’ADN du logement communautaire, l’une de ses raisons d’être est d’accueillir les exclus. Il crée, de surcroit, un contexte et une structure d’appui qui permet à ses habitants touchés par l’exclusion et la discrimination de reprendre pied. Le simple fait de ne pas être soumis à l’arbitraire, aux pressions financières indues et aux multiples frustrations quotidiennes qui génèrent la désaffiliation sociale, agit souvent comme un tremplin qui permet aux individus d’améliorer leur état de santé, ainsi que leur situation sociale et professionnelle bien au-delà des simples enjeux d’habitation au sens strict.
Le Centre est d’avis que ce rôle peut être accru en mobilisant l’ensemble des parties prenantes de notre secteur. Notre ambition est de rehausser la part du communautaire dans le marché locatif, pour la faire passer de 5 % (actuellement) à 10 % puis à 20 %.
Agir pour appliquer un droit fondamental
La Charte des droits et libertés rattachée à la Constitution canadienne garantit le droit à l’égalité, qui implique notamment de ne pas subir ou faire subir de discrimination sur la base de la race.
À l’heure actuelle, le secteur du logement, particulièrement en contexte de rareté, est lieu de discrimination. On se doit collectivement de trouver des solutions structurantes pour attaquer de front les inégalités raciales et le logement communautaire est source d’espoir.
Les organisations travaillant dans le domaine du logement partagent une vision qui génère des logements sûrs, dignes et abordables pour toutes et tous. À nous tous, ensemble, de faire de cette vision une réalité.
Nous vous invitons donc à vous impliquer pour changer les choses
Si vous êtes du Québec, participez au projet Plancher qui vise à accélérer la croissance du logement communautaire.
Si vous êtes issu.e d’une communauté noire, informez-vous sur les activités du Centre de ressources techniques en habitation pour les communautés noires qui vise à trouver des solutions pour un meilleur accès au logement aux Noirs.