Certaines personnes peuvent avoir de la difficulté à se rappeler ce que l’acronyme ACORN signifie, mais il ne fait aucun doute que l’organisme de défense du droit au logement est à la source de gains majeurs pour les locataires partout au Canada, à travers le travail de ses 24 chapitres de quartier.
Quand Kim Rankin, une résidente de Dartmouth, a reçu un avis de son propriétaire pour une augmentation de loyer de 300 $ par mois, elle s’est adressée à la Association of Community Organizations for Reform Now Canada de Nouvelle-Écosse pour signaler la hausse déraisonnable du loyer de même que des problèmes existants par rapport au bâtiment.
Rankin a alors été invitée à un atelier de défense des droits des locataires au sujet des normes minimales d’entretien des bâtiments. Cet événement a été un catalyseur au commencement de son action pour la défense des droits.
Rankin n’a pas seulement obtenu de meilleures conditions dans son immeuble, mais l’augmentation de loyer a été annulée quand Nova Scotia ACORN a obtenu les meilleures protections pour les locataires qu’a connues la province en vingt ans, sous la forme d’un contrôle des loyers.
« Il y a beaucoup de gens qui sont peut-être apathiques », affirme la directrice générale et chef organisatrice de ACORN Canada, Judy Duncan. « Mais il y a aussi beaucoup de gens qui veulent s’impliquer. Je crois [seulement] que certaines personnes ne savent pas comment. Et je crois que parfois, ça semble [écrasant] de penser : “Comment est-ce que je peux faire ça par moi-même?”. Mais quand on leur donne la chance de s’impliquer… »
Une vaste campagne d’éducation et de participation au sujet de l’abordabilité du logement et du contrôle des loyers a mené, en novembre 2020, à ce que la province, de façon temporaire, limite les augmentations de loyer à 2 % et interdise les rénovictions, et crée une Commission sur le logement abordable ayant comme mandat de faire des recommandations pour améliorer l’accès au logement en Nouvelle-Écosse. Une subvention de 48 000 $ du Centre de transformation du logement communautaire a été déterminante pour arriver à ces résultats, dit Duncan.
« [La subvention] nous a vraiment aidés à continuer à faire le travail pendant la pandémie », raconte Duncan. « Ça nous a donné les ressources nécessaires pour nous concentrer sur la participation de nouveaux locataires et sur la recherche de possibilités pour développer leurs aptitudes en leadership. Ça nous a aidés à faire émerger de nouveaux leaders et à impliquer davantage de personnes; c’est ce qui est ultimement nécessaire pour gagner. Il y a des personnes vraiment excellentes qui sont devenues des leaders communautaires. »
S’organiser en temps de pandémie
ACORN Canada est un organisme sans but lucratif qui s’occupe donner du pouvoir aux locataires et de les éduquer. D’après ce qu’indique son site Web, ACORN est « dirigé par des bénévoles, et des membres de la communauté forment d’autres membres de la communauté aux aptitudes en leadership, avec le soutien d’employé.e.s ».
Alors qu’elle avait déjà travaillé pour un chapitre d’ACORN aux États-Unis, Duncan a reçu du financement pour le démarrage de la division canadienne en 2003. Elle y a utilisé les mêmes méthodes d’organisation qui s’étaient révélées gagnantes au fil des années.
« Voici le genre de stratégies [que nous utilisons] quand nous nous organisons », dit Duncan. « Vous savez, beaucoup de porte-à-porte, beaucoup de visites de la part de leaders, beaucoup de visites à domicile, beaucoup d’actions dans les rues. »
Ce qui est arrivé en Nouvelle-Écosse n’est qu’une des nombreuses victoires qu’ACORN Canada a signalées. Le Centre a accordé à l’organisme un total de 275 000 $ en subventions provenant de son fonds d’initiative d’aide communautaire, en soutien à des projets partout au pays.
Mais la pandémie a affaibli les moyens d’organisation habituels d’ACORN, forçant l’OSBL à adapter ses stratégies à un monde dans lequel les contacts sont diminués, par exemple en déplaçant les rencontres en ligne ou à l’extérieur, tout en adhérant à des protocoles sanitaires stricts.
« Quand la pandémie a frappé, c’était un peu comme […] “Comment va-t-on réagir à ça?” Parce que les locataires ont encore plus de problèmes et nous ne pouvons pas faire des visites à domicile. Heureusement, nous avions une importante liste de contacts, alors nous avons pu appeler les gens et savoir ce qui se passait », raconte Duncan.
« Et alors nous nous sommes mis à faire beaucoup de [rencontres] style Zoom, nous avons ciblé des propriétaires et des politiciens, fait réparer des immeubles ou essayé de [promouvoir] de meilleurs protocoles pour le ménage. »
Redonner le pouvoir aux locataires
La pandémie n’a pas, toutefois, affaibli le moral. Et à Toronto, comme en Nouvelle-Écosse, les victoires ont été significatives.
D’après Duncan, « [les gens] avaient besoin d’annulations de loyers ».
Toronto ACORN a obtenu des améliorations au programme RentSafeTO (qui fait en sorte que les propriétaires d’immeubles de logements se soumettent aux normes d’entretien des bâtiments) en y faisant inclure des politiques obligatoires de nettoyage des immeubles d’appartements privés. Aussi, l’organisme a obtenu que 5 millions de dollars de nouvel argent soient déposés dans la banque de loyers de la Ville, de même que l’instauration d’un projet pilote à travers lequel des subventions seront offertes à des locataires qui ont des arriérés de loyers; une solution progressiste à vieux un problème.
« J’ai été capable de stopper mon éviction causée par les arriérés de loyer », affirme Kiri Vadivelu, un locataire du secteur Scarborough Centre. « J’ai été capable d’apprendre à propos de mes droits en tant que locataire. Les ateliers [d’ACORN] m’ont vraiment aidé à approfondir mes connaissances et à bâtir ma confiance. Je suis motivé à me battre pour ma communauté. »
En Colombie-Britannique, où le nombre d’évictions a connu une montée fulgurante pendant la pandémie, avoir un chez-soi est devenu la mesure de santé publique la plus efficace. On trouve maintenant deux chapitres officiels à Surrey. Les membres de BC ACORN se sont battus pour éviter l’éviction de la famille VanVlack par Metro Vancouver Housing.
Les VanVlack ont quatre enfants, dont deux avec des besoins particuliers. Grâce à la campagne de ACORN, un avocat spécialisé en droits de la personne et des fournisseurs de logements sans but lucratif se sont joints aux efforts pour aider la famille.
Vers la fin d’une année couronnée de succès, ACORN Canada ne ralentit pas la cadence avant que chaque locataire ait obtenu plus de pouvoir sur sa vie.
« Si on se penche vraiment sur la question, le logement ne devrait pas être un bien sur le marché, non ? Ça ne fonctionne pas [quand vous] logez des gens. [Le gouvernement] devrait tout faire pour retirer le plus de logements du marché. Le logement social, le logement sans but lucratif, les coopératives; c’est là où les personnes devraient habiter », ajoute Duncan.